samedi 17 avril 2010

La contraception ou Comment impressionner un enfant

Un atelier sur la sexualité se donnait cette semaine à l'école primaire où Madame B. enseigne. Il y a eu un micro-scandale chez les parents en raison d'une rumeur voulant que les enfants de sixième année apprendraient à mettre un condom. J'ai été surpris de la forte réaction à cette rumeur parce que, pour ma part, c'est à cet âge que j'ai reçu ces informations. L'histoire n'est pas banale.

J'avais onze ans et mes préoccupations concernaient davantage les jeux vidéos que les filles. Donc, dans la mesure où aucune de mes compagnes de classe ne s'appelait Zelda, l'entrejambe n'était pas sollicité. C'est dans cette quiétude hormonale que je vis entrer dans la classe l'intervenant chargé de l'atelier sexualité. Vêtu d'un habit noir, élégant mais sévère, il avait à la main une valise en aluminium chromé (comme celles qui sont reliées au poignet par des menottes). Elle était verrouillée. La tension était palpable. L'homme ouvrit cérémonieusement la chose. Je crois qu'un élève s'est évanoui. L'intérieur était tapissé d'un velours noir épousant la forme de divers objets. Autrefois, cette valise avait certainement renfermé une arme à feu et ses accessoires. Elle avait été récupérée pour abriter stérilets, condoms, mousses spermicides et autres contraceptifs.

J'en conclus trois choses:
1. Les contraceptifs se vendent dans des valises d'aluminium chromé.
2. Se promener avec un condom sur soi est aussi banal que de traîner dans son jeans un 9 mm.
3. La contraception est un domaine de trafic dangereux.

L'année suivante, dans le cadre d'une campagne préventive, des intervenants distribuaient des condoms gratuits. J'ai paniqué, je ne voulais pas être intégré au cartel Trojan. Augmentation des rythmes respiratoire et cardiaque, dilatation des pupilles, transpiration... L'intervenante a certainement cru que j'étais sexuellement excité à la seule vue du préservatif. Elle me regarda avec un sourire de «Toi, tu vas être précoce.».

Bref, si vous voulez aider les enfants, parlez de sexualité tant que vous voulez. Mais, n'utilisez pas une valise de chrome argenté.

mercredi 7 avril 2010

Hygrométrie sociale

À mon grand désarroi, la documentation en psychologie concède aux premières impressions un rôle assez important dans l'issue des rencontres. Soyez donc heureuses, belles et éloquentes personnes, car vous avez une avance réelle sur le bégayeur, le timide et le laid. À cet égard, je suis fort reconnaissant de ne plus en être à mes premiers moments avec Madame B., laquelle est belle et éloquente. En effet, ces premiers moments me semblaient être une lutte des plus inégales. J'aurais tant aimé que le dandysme soit d'actualité. Ainsi, j'aurais pu recourir de façon légitime à tous les artifices de l'apparence, sans être taxé de snobisme, afin de rejoindre l'élégance naturelle de ma femme.

Aujourd'hui mariés, nos compétences en matière de première impression ne sont guère plus égales. Voici un épisode récent qui le dénote clairement et tristement :

Madame B. rencontre un de mes compagnons de classe. En deux minutes, elle identifie quatre points communs et diagnostique précisément son type d'humour. L'interlocuteur est charmé et alimente la conversation. Elle complimente avec justesse, elle critique avec esprit, elle rit en musique. Je regarde avec fascination ces façons qui m'avaient foudroyé il y a quelques années.

Lorsque le temps écoulé sans intervention de ma part rend ma présence étrange, l'étudiant se tourne vers moi pour me saluer. Je ressens la menace. Mes pires craintes sont confirmées lorsque je le vois élever sa main haut dans les airs. Cette abduction aurait été une magnifique amorce pour une gifle, ce que j'aurais d'ailleurs préféré. Une gifle est certes douloureuse (ask Barney), mais courte. Malheureusement, le mouvement m'étant adressé est plutôt le signal d'une poignée de main complexe, longue et humiliante. Vous en connaissez certainement la chorégraphie : vous devez faire claquer votre main dans celle de l'autre («clac»), puis faire une rotation de la paume jusqu'à ce que les pouces s'entrecroisent («swip»). Ensuite, il vous faut retirer la main en glissant les doigts («slip»), puis cogner gentiment vos jointures, points fermés («koc»).

La complexité de la chose génère chez moi une angoisse qui active un ridicule et inutile mécanisme d'humidification des paumes. Alors, le «clac-swip-slip-koc» se transforme en «smack-slash-slurp-plush». Or, l'amitié fait exception aux nombreuses choses dont l'humidité favorise la croissance.

L'étudiant regarde avec un étonnement dédaigneux Madame B., ne concevant pas qu'une interlocutrice si agréable fréquente une telle moiteur. Il prend donc congé de nous avec un empressement tout hygiénique.

De nouveau, j'ai souhaité ardemment être un dandy. Alors, je porterais des gants et j'aurais abondance d'amis.
 
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